PICTO, regards croisés sur 60 ans de photographie
“La technique ne doit être que l’intendance mise au service du photographe” Pierre Gassmann
L’hôtel Le Royal Monceau – Raffles Paris accueille jusqu’au 08 octobre 2011 l’exposition des 60 ans de Picto au sein de sa galerie Art District. Regards croisés sur 60 ans de photographie est l’occasion de revenir sur six décennies de complicité entre certains des plus grands photographes de notre temps et PICTO, premier laboratoire photographique européen créé en 1950 par Pierre Gassmann.
De Raymond Depardon à Robert Doisneau en passant par Henri-Cartier Bresson, Sarah Moon ou encore Paolo Roversi, l’exposition met à l’honneur les plus grands noms de la photographie en s’attachant tant à l’évolution des techniques de tirages et d’impression qu’aux sensibilités diverses des artistes.
43 œuvres, de la photographie historique au photoreportage en passant par la photographie de mode, ont été sélectionnées par Hervé Mikaeloff, le curateur du Royal Monceau, nous offrant ainsi la plus fabuleuse des promenades historiques sur le thème de la complicité.
Picto est né d’une belle histoire de complicité dans les années 30 entre Pierre Gassmann et Brassaï rapprochés par une passion commune, celle de l’image. En 1950, Pierre Gassmann crée, rue de la Comète à Paris, le modeste laboratoire PICTORIAL Service. Amateur passionné de photographie, technicien hors pair au charisme évident, Pierre Gassmann se lance dans le tirage haut de gamme d’épreuves photographiques et devient très vite le tireur attitré des grands talents photographiques de ces années d’avant et d’après guerre : Henri Cartier-Bresson, Robert Capa, Chim, William Klein, Robert Doisneau et bien entendu Brassaï.
Au fil de ses soixante ans d’existence, Picto a fait évolué son savoir-faire technique suivant les mutations technologiques tout en conservant ce qui fait sa marque de fabrique depuis sa création : une complicité forte et une confiance sans bornes avec les photographes.
C’est cette relation étroite entre tireurs et photographes, cette complicité, que PICTO a souhaité mettre à l’honneur pour son 60ème anniversaire, à travers un livre édité chez Actes Sud, et l’exposition au Royal Monceau. PICTO a fait une sélection d’images des photographes disparus illustrant la complicité, et a demandé aux photographes qui collaborent aujourd’hui avec le laboratoire de choisir l’une de leurs photos existantes, ou de prendre un nouveau cliché sur ce même thème.
Voir avec le regard de l’autre. Nulle phrase ne peut exprimer avec plus de justesse ce fabuleux parcours de regards sur le monde que nous offre ses 60 ans de regards croisés. La balade photographique débute par une confrontation entre les œuvres en noir et blanc des photographes faisant partie du patrimoine de la photographie et celles de photographes plus contemporains qui illustrent en couleurs le thème de la complicité.
Robert Capa, Josef Koudelka, Franck Horvat, Edouard Boubat, Robert Doisneau, Henri Cartier-Bresson, Jacques-Henri Lartigue, Brassaï, André Kertesz, Man Ray font face entre autres à Raymond Depardon, Florence Chevallier, Roberto Frankenberg, Christophe Meimoon et Christian Courrèges. Le couple dans l’eau d’Henri Cartier-Bresson, photographie intemporelle par excellence, est troublante de modernité. Que dire de cette leçon de dynamisme et de mouvement que donne le cliché pris par Roberto Frankenberg d’un Jean-Paul Gaultier mettant toute son énergie à serrer le corset de Jade Parfitt.
Le dernier arrêt dans cette fabuleuse promenade est tout aussi émouvant que celui des grands maîtres de la photographie tant la qualité des clichés exposés est au rendez-vous, sublimée par des tirages d’exception. La complicité s’exprime ici d’une autre manière. Peter Knapp a su définitivement traduire cet instant si particulier que partage le créateur et son modèle lors des essayages en immortalisant Azzedine Alaïa et le mannequin Marcie dévoilant le dos d’une création. Mais c’est bien vers le photographe que se tourne le couturier une main négligemment mais fermement posé sur la hanche de son mannequin comme s’il lui offrait sa nouvelle création.
La complicité peut être indirecte portée simplement par l’émotion suscitée, dans laquelle on ressent la confiance du sujet qui se laisse approcher par l’autre. La quasi-gémellité des deux petits Maliens, si similaires mais avec tant de différence, est exprimée avec beaucoup de justesse par Jean-Baptiste Huynh. Les yeux d’une Charlotte Rampling fardée de blanc deviennent envoûtants à travers l’objectif de Thibault Grabherr. Le regard bienveillant d’Al Gore sur Patrick Swirc traduit à lui seul la complicité qui peut unir deux hommes qui s’estiment énormément.
Dans la Galerie Transversale, le public peut découvrir une autre facette de l’engagement de Picto aux côtés des photographes avec la présentation du travail d’Isabelle Chapuis, lauréate du Prix Picto de la jeune photographie de mode en 2010 que vous retrouvez ici.
Regards croisés sur 60 ans de photographie est une exposition qui nous faire le plus beau des voyages, celui de l’histoire de la photographie. Mais aussi, elle nous rappelle combien le tireur est le meilleur ami du photographe, son complice par excellence et qu’il nous permet de voir avec le regard de l’autre.
Crédit photo :
Image à la Une : Italy 1933 – Copyright : Henri Cartier-Bresson
Art District – Le Royal Monceau Raffles Paris – 37- 41, avenue Hoche, 75008 Paris
Jusqu’au 8 octobre 2011, du mardi au samedi, de 11 heures à 22 heures (entrée libre)
Marie-Odile Radom
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