Louis Vuitton – Marc Jacobs au Musée des Arts Décoratifs de Paris
« Pour certains, la vie n’a pas de sens sans la mode, pour moi c’est la mode qui n’a pas de sens sans la vie. » Marc Jacobs
Jusqu’au 16 Septembre 2012, le Musée des Arts Décoratifs de Paris rend hommage aux deux figures icôniques d’une maison d’exception, symbole du luxe à la française : la Maison Louis Vuitton. Cette exposition inédite retrace le parcours des deux personnalités les plus emblématiques de cette maison séculaire, celle de Louis Vuitton, fondateur de l’art du voyage et celle de Marc Jacobs, l’iconoclaste directeur artistique de la maison au monogramme.
Déployée sur deux niveaux, elle consacre un étage à chacun des créateurs dans une scénographie de Sam Gainsbury et Joseph Bennett. Les malles de Louis Vuitton sont présentées en regard des collections et accessoires de mode du XIXe siècle du musée au premier étage, tandis qu’une sélection des modèles les plus emblématiques créés par Marc Jacobs depuis ces 15 dernières années est mise en scène au second.
Plus une mise en perspective qu’une réelle rétrospective, cette mise en lumière met en évidence les contributions de deux visionnaires à l’essor de la Maison Louis Vuitton, maison séculaire au savoir-faire sans pareil, tant sur le plan accessoires de voyage que celui du prêt-à-porter.
Retraçant le parcours du fondateur de la marque, l’exposition démarre avec les débuts de l’industrialisation puis poursuit avec ses contraintes, axant la réflexion sur l’art du voyage, ADN de la marque, pour finir par les innovations apportées par le malletier pour se plonger de plein fouet dans la modernité d’une marque à la réussite flamboyante.
Cette première partie suit le parcours exceptionnel d’un simple emballeur de luxe qui, de par son ingéniosité, a su conquérir le marché de la maroquinerie en proposant des malles innovantes aux nouveaux bourgeois et aux élégantes en quête de voyages.
Né en 1821 dans le Jura, Louis Vuitton quitte sa famille de meuniers à 14 ans pour servir l’armée napoléonienne. Démobilisé en 1837, il devient apprenti au 213 rue St-Honoré chez le layetier-coffretier-emballeur Maréchal avant de s’établir à son propre compte en 1854 non loin de la rue de la Paix.
D’emblée, Louis Vuitton se démarque et se définit comme « emballeur ». Ses en-têtes apportent une précision qui prendra tout son sens : « Spécialité pour l’Emballage des Modes ». La malle Vuitton devient rapidement l’accessoire indispensable de l’aristocratie et de la bourgeoisie industrielle de la fin du XIXe, qui s’enrichit, voyage et emprunte les lignes de chemin de fer.
Riche d’articles d’époque, cette première partie est une plongée dans l’histoire de manière plutôt ludique. C’est par un magnifique zootrope de Dan Hillier que l’on plonge dans l’univers de Louis Vuitton. Puis, nous voici plongé au coeur du Paris du Second Empire lorsque les gardes-robes deviennent plus conséquentes grâce à l’apparition des grands magasins.
Le visiteur découvre alors dans de petites vitrines les innombrables pièces du trousseau idéal de l’époque, à la faveur d’une collection de toilettes de poupées, astucieux subterfuge destiné à nous prouver la mesure de la multiplication des toilettes et des accessoires et de ces contraintes de transport.
Des toilettes d’époque sont autant de preuves des liens qui unissent dès le début la Maison Louis Vuitton et la mode. Ses collaborations avec la Maison Worth sont légion. Fondateur de la Haute Couture, Worth impose des nouveaux codes et usages vestimentaires, augmentant le nombre d’accessoires et démultipliant le nombre de pièces dans la garde-robe bourgeoise.
Puis viennent les premières malles brevetées par Louis Vuitton recouvertes d’une toile cirée grise dite Trianon permettant de les imperméabiliser. Les armoiries et les monogrammes des propriétaires sont ensuite apposés sur cette couche de couleur.
Ces premières malles recèlent toutes les techniques d’alors et regorge d’innovations telle cette malle-lit. Chaque vente est consignée, notée pour la postérité.
En véritable génie des affaires, Louis Vuitton souhaite différencier ses malles des autres. En 1877, il dépose une toile rayée disponible en plusieurs coloris. Onze ans plus tard, il fait un nouveau dépôt de brevet, cette fois-ci pour la fameuse toile Damier, reconnaissable entre toutes, qui, plus sophistiquée, intègre son nom dans le motif décoratif. Plus tard viendra l’autre signature Vuitton, un ensemble de rosaces entourant le monogramme LV, créé par son fils après sa mort.
Si la première partie de l’exposition retraçant la vie de Louis Vuitton et par la même l’historique de la marque, se rapproche d’une exposition classique, la présentation de l’apport de Marc Jacobs à la marque Louis Vuitton peut dérouter au premier abord. Moins traditionnelle, cette seconde partie se veut une plongée dans l’univers du créateur, offrant à notre candide cerveau une fenêtre ouverte sur ses inspirations, ses coups de cœur avant de dévoiler son propos.
Accueilli par un mur d’écrans où se superposent des vidéos chocs, cette mise en bouche appelée sommairement l’univers de Marc Jacobs se veut une mise en images du puits créatif du créateur. Sons et images font de cet espace celui d’un homme qui a pris la mesure de son époque et a su faire de Louis Vuitton une marque qui séduit aux quatre coins du monde.
Sur de grands pans de murs, écrans et images figées restituent ses diverses influences. On reconnaît Bowie version Ziggy Stardust, Iggy Pop, Mike Jagger, Elizabeth Taylor, Mia Farrow, Kirsten Dunst dans Marie-Antoinette, Janet Leigh dans Psychose mais aussi Dorothy du Magicien d’Oz, Bob l’éponge. Une vitrine est même consacrée à Kate Moss.
Puis vient le croisement tant attendu entre Louis Vuitton malletier et Marc Jacobs directeur artistique à travers un mur des sacs emblématiques de la marque présentés tels de somptueuses friandises. Car ce qui fait la femme Vuitton, sa signature, c’est le sac à main qu’elle porte.
Né à New York en 1963 dans une famille aisée, Marc Jacobs grandit dans le Upper West Side. L’ audace artistique de Marc Jacobs lui valut son poste chez Perry Ellis en 1992. Il a 25 ans quand il débarque, en 1997 chez Louis Vuitton pour transformer le bagagiste de luxe en maison de mode. Marc Jacobs va alors faire basculer la Maison Vuitton dans la pop culture et y imprimer profondément sa patte faite de différentes influences fortes.
Le musée souligne la carrière du créateur chez Louis Vuitton, où il fut désigné Directeur Artistique en charge des premières lignes de Prêt-à-Porter de la Maison, déroulant comme un manifeste le rapport que le créateur entretient avec le monogramme. Il s’est réapproprié les codes culturels de la marque tout en les détournant, incarnant à la perfection le modèle type du créateur contemporain.
Les créations les plus emblématiques des défilés de ces dernières années sont alors présentées. L’esprit avant-gardiste du créateur, qui a su dans une démarche presque naturelle associer l’art contemporain à la maroquinerie, est parfaitement retranscrit dans ces vitrines mêlant le faste à la création pure dans des salles où le damier a pris possession des murs.
Quatre saisons ont été nécessaires avant que Marc Jacobs ne s’approprie le fameux monogramme. Sa première collection ne proposait qu’un sac et le monogramme était curieusement absent. Les deux lettres entrelacées sont alors réservées aux doublures des trenchs, et vêtements de la marque. Pour la collection Printemps Eté 2000, le monogramme réapparait de manière ultra voyante sur les sacs et vêtements.
Dès l’année suivante, créant ce fameux pont entre Vuitton et l’art contemporain, Marcs Jacobs fait appel à des artistes de renommée internationale pour se réapproprier le monogramme. Premier d’entre eux, Steven Prouse, écrit en 2001 Louis Vuitton en grosses lettres sur les sacs.
Suivent les explosions de couleurs et acidulées de Takashi Murakami et les imprimés de Richard Prince, qui furent immédiatement de véritables succès.
Cette mise en parallèle Vuitton-Jacobs permet d’éclairer le système de la mode durant ces deux périodes charnières que sont l’industrialisation de la fin du XIXe siècle et la globalisation du début du XXIe siècle. Y sont évoqués les métiers d’art, les avancées techniques, les créations stylistiques et les collaborations artistiques.
Mais chacune de ses parties si différentes soient-elles n’a qu’un but : nous expliquer comment ces visionnaires ont su s’inscrire à leur manière dans leur époque pour en tirer les conséquences et faire avancer ainsi toute une industrie.
Et cette exposition y réussit plutôt bien, montrant brillamment de quelle façon ces deux hommes se sont appropriés les codes culturels et les bouleversements de leur époque pour les retranscrire et écrire ainsi chacun un pan de l’histoire de la marque et plus généralement de l’histoire de la mode.
Riche et passionnante, elle nous permet de comprendre comment la Maison Louis Vuitton a su traverser les époques, suivant les évolutions et restant toujours à l’écoute d’une scène artistique contemporaine, comme le prouve la récente collaboration de la maison avec Yayoi Kusama. A travers deux personnalités si fortes et visionnaires, la Maison Louis Vuitton est devenue une marque qui symbolise à la fois le Luxe et l’artisanat à la française.
Et en jetant un dernier coup d’œil à la poupée miniature représentant Marc Jacobs clôturant l’exposition, on ne peut s’empêcher de sourire après un fabuleux voyage dans le monde du luxe.
Les Arts Décoratifs – Mode et textile
107 rue de Rivoli
75001 Paris
Tél. : 01 44 55 57 50
Marie-Odile Radom
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Haaaaa elle doit être CANON cette expo !!!! <3<3<3