Stéphane Rolland Haute-Couture Printemps Eté 2012
« L’architecte est une sorte d’oratoire de la puissance au moyen des formes. » Friedrich Nietzsche
Quoi de plus naturel que le cadre grandiose de la Cité de l’Architecture et du Patrimoine pour l’Architecte de la mode ? La Galerie des Moulages était bien le lieu idéal pour la présentation de la dixième collection de Haute-Couture de Stéphane Rolland, véritable passionné d’architecture et adepte de silhouettes graphiques.
Dix ans de création du couturier et le plaisir est toujours là intense, sa création ne fait que se bonifier prenant une profondeur de saison en saison. Pour le Printemps-Été 2012, le créateur nous livre une collection architecturée extrêmement fluide, tout en volumes aériens inspirée par les œuvres du sculpteur et plasticien Michel Deverne en qui il se reconnait, hommage bien prémonitoire.
Très attaché au travail du trait et de la ligne, cet artiste exprimait un profond désir de donner une dimension architecturale à ses œuvres d’art. Ses grands reliefs en métal brillant ou en laque monochrome résultaient de découpages, de pliages et de remaniement de motifs géométriques avec le cercle comme élément de prédilection pour créer un jeu dynamique d’ombre et de lumière.
Un coup d’œil inattentif amènerait à penser cette collection comme une nouvelle épure minimaliste à l’extrême. Mais soudain on comprend son erreur tant chaque pièce est ponctuée de richesses. A l’instar de Michel Deverne, Stéphane Rolland sculpte dans ses robes différentes couches, différentes épaisseurs de gazar comme si c’était du marbre ou de la pierre. Il crée un pont entre les deux arts où s’exerce toute sa créativité.
Les lignes graphiques exaltent une féminité à fleur de peau. La silhouette est allongée comme étirée. Des spirales s’ajustent sur une robe s’ouvrant en corolle. Pliés et plissés viennent s’épanouir sur une silhouette tandis que des volutes légères habillent les poitrines. Ondulation et légèreté souligne le mouvement des lignes et font une silhouette sans pareil.
Une nouvelle fois, Stéphane Rolland fait rimer mode et structure grâce à ces longs fourreaux à étage en jersey, ces robes architecturales parfois asymétriques à empiècement métallique. Alvéoles articulées sur une hanche, ailerons feuilletés pour des revers asymétriques ou spirales posées sur une épaule, chaque création devient sculpture organique des plus désirables. La femme devient matrice et une source intarissable d’inspiration. Parfois une traîne vaporeuse ou un empiècement plissé façon origami surprend et conquiert.
L’or illumine la collection. Graphique, il se mêle au tissu en néo-plastron ou en pastille sur les robes et souligne une taille. Une plaque dorée habille de métal les pieds délicats des mannequins les amenant sur des hauteurs vertigineuses ou fait de sacs à main très géométriques de nouveaux objets de désir.
Le blanc et le noir font une partition des plus agréables pour le printemps été 2012 entre ombres et lumière et n’hésitent pas à se marier pour une distinction incomparable. Quelques modèles d’un rouge profond viennent perturber cette bichromie à laquelle vient s’ajouter un jaune absinthe des plus captivants.
Et désormais un classique, on retrouve avec une satisfaction non feinte les fameux gants donnant l’illusion que les mains ont été trempées dans de l’encre. L’eye-liner se fait graphique, bordant les yeux de noir pour accentuer le regard, la chevelure est ultra-lisse.
Puis vient la sculpture ultime. Tel un trait de peinture rouge foudroyant, la muse du créateur Yasmin Le Bon fait son entrée dans une robe de mariée sculpturale en version rouge laquée. Aidée par ses deux gardes du corps, elle se déplace lentement nous permettant d’admirer le travail d’architecte de la mode du couturier sur une longue traîne en jersey époustouflante.
Une nouvelle fois, le talent de Stéphane Rolland fait mouche. Pour ses dix ans de créations de Haute-Couture, il nous livre une nouvelle écriture de son style, concis, percutant et se fait l’expression d’une poésie graphique. En véritable artiste, il imagine des robes sculptures aux lignes graphiques pour des femmes fortes à la personnalité affirmée.
Plissés, angles et courbes n’ont plus de secret pour lui. Celui qu’on plaît à appeler l’Architecte de la mode vient encore de nous prouver qu’il est bien plus qu’un architecte. Chacune de ses œuvres tient de l’art, un art fluide, vif, comme on aime. Il est au-delà….
Crédit photo : with the courtesy of Stephane Rolland
Marie-Odile Radom
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all this dress are so beautifull