Juun J Hommes Automne Hiver 2012 – 2013
« We try to capture people with our visual language in a fairy tale fashion, in which they could find a piece of themselves. Every picture has a story, and it could be read differently, but that’s o.k. » AlexandFelix
Les liens entre le monde de la mode et celui de la photographie ont toujours été très forts. De parallèles, ils deviennent complémentaires, chacun trouvant en l’autre un puissant champ d’exploration. Mais jamais une collaboration n’avait atteint un tel niveau sublimant l’un et l’autre dans un nouveau langage, brillant, graphique et inspiré. C’est le cas pour la collection Automne Hiver 2012 – 2013 du créateur sud-coréen Juun J.
Symbiose du talent du créateur et de la vision étonnante d’artistes contemporains, la collection Distended est une parfaite interprétation de la série de photographies 13 Queens du duo d’artistes suisses, Alex Gertschen et Felix Meier, plus connus sous le nom d’AlexandFelix.
Réputés pour mettre en scène leurs sujets et leurs modèles avec des objets et des matériaux différents, sans l’utilisation d’ordinateurs, le duo créatif crée des mondes imaginaires, absurdes et surréalistes à la fois, aux couleurs profondes avec un souci du détail qui force l’admiration.
La série 13 Queens est une formidable démonstration de leur style et plonge le spectateur dans un monde onirique. Langage d’un genre nouveau, ces œuvres photographiques mettent en scène des femmes androgynes au teint de porcelaine devant des arrières-plans aux couleurs vibrantes. Une accumulation d’objets forment de néo-couronnes exacerbées s’opposant au bas du corps plus frêle.
Sur une bande-son assez envoûtante, Juun J nous présente de nouvelles lignes aux épaules exacerbées et tombantes sur pantalons moulants accentuant ainsi le haut de silhouettes graphiques et structurées. C’est le souffle coupé que nous découvrons, à travers une épaisse fumée blanche, ces silhouettes disproportionnées aux épaules prononcées et aux lignes directement inspirées par l’esthétisme des 13 Queens, poussant même le mimétisme jusqu’à utiliser ces œuvres pour en faire des imprimés aux couleurs chatoyantes.
Tel un sculpteur, Juun J a façonné ses silhouettes à l’aspect futuriste, multipliant les superpositions dans une collection minimaliste un plus sportive qu’à l’habitude. Conçue pour affronter les rigueurs d’un hiver qu’on prévoit dur, chaque silhouette est une proposition forte, protectrice mixant les matières et jouant sur les volumes. La laine, le tweed, le cuir et le néoprène cohabitent parfois sur les vestes et les blousons, notamment grâce à des empiècements graphiques.
L’inspiration militaire est palpable. Telle une néo-armée futuriste, les silhouettes s’enchaînent dans un jeu de déconstruction jouant sur les dimensions et les volumes. Les encolures s’élargissent et s’accompagnent de capuches. Tailles marquées et épaules rondes ponctuent des vestes superbement taillées.
On découvre alors des manteaux épais à cols montants dans des tonalités marron, noires et grises. Les pulls deviennent larges. Le néoprène fait son grand retour offrant maintes possibilités de structuration autour de superbes formes géométriques.
Les pantalons plutôt skinny terminent leur course dans des boots minimalistes issues de la collaboration avec Kim Kiroic. L’homme Juun J n’oubliera pas son couvre-chef qui n’est pas sans rappeler le casque romain.
Le final prend des allures de défilé militaire avec des hommes casqués portant combinaisons de ski avec empiècements.
Cette saison, les silhouettes surdimensionnées ont été légion mais aucune proposition n’a été aussi forte que lors du défilé Juun J. Mêlant créations artistiques et mode, la collection Automne Hiver 2012 – 2013 signe le renouveau de l’homme moderne tourné vers le futur et bien protégé pour en supporter les contraintes. En véritable exercice de style sur les volumes, chaque silhouette est une proposition presque architecturale reprenant dans la coupe des compositions photographiques. Loin de renier son propre style, le créateur multiplie ici et là superpositions et mélange de matières. Et nous, on applaudit des deux mains…
Crédit photo : Olivier Claisse
Marie-Odile Radom
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