In Memoriam à la Galerie Polka
« Si j’avais pu traverser le pont de Brooklyn quelques minutes auparavant, je serais toujours sous les décombres du World Trade Center« . Klaus Reisinger
New York. 11 Septembre 2011. 8h46. Un avion percute la Tour Nord du World Trade Center. 9h03. Un Boeing percute la Tour Sud. A 9h58, la Tour Sud s’effondre puis c’est au tour de la Tour Nord de s’écrouler trente minutes plus tard. Personne n’a oublié l’horreur absolue de ces instants ni ce qu’il faisait au moment précis où il a appris la nouvelle.
A l’occasion du dixième anniversaire de l’attentat du World Trade Center, la galerie Polka présente jusqu’au 05 Novembre 2011 une exposition collective In Memoriam New York – New York. L’exposition, entre hommage et témoignage poignant, revient sur le plus grand attentat de l’Histoire à travers l’objectif de six photojournalistes, chacun apportant son propre éclairage sur un événement qui a laissé les habitants de New-York et le reste du monde partagés entre l’horreur et la stupéfaction.
Tout commence le 9 septembre 2001. Le commandant Massoud, opposant à Oussama Ben Laden, est assassiné en Afghanistan dans un attentat à la caméra piégée par deux faux journalistes arabes envoyés par Al-Qaïda.
Le photographe Reza, grand ami et confident du commandant, avait réalisé en 1985 le célèbre portrait de celui qu’on surnommait le « Lion du Panshir », seul rempart d’un pays contre la montée des extrémismes. Toute l’humanité d’un homme, qui avait voué son existence à faire de l’Afghanistan un pays libre, uni et souverain, transparaît dans ce regard sincère teinté d’inquiétude.
Deux jours après l’assassinat du commandant Massoud, le vol 175 de la United Airlines se brise sur la Tour Sud du World Trade Center. Depuis 20 minutes, les journalistes commentent le premier crash sur la tour Nord, croyant à un accident. Le photographe Robert Clarke est chez lui à Williamsburg dans Brooklyn lorsque sa compagne l’informe de la nouvelle.
De son balcon, il commence à prendre des photos et rapidement monte sur le toit de son immeuble armé de son plus grand zoom. Le photographe enregistre stoïque l’attaque de la Tour Sud par l’avion de la United Airlines. L’évidence surgit, ce n’est pas un accident mais un attentat. Les quatre clichés qui en découlent feront le tour du monde, vibrant témoignage d’un terrible moment. En 2001, il obtiendra pour cette série de photos le Premier Prix World Press.
Quelques minutes après l’effondrement des deux Tours, les photographes Klaus Reisinger puis Allan Tannenbaum arrivent sur les lieux de l’attentat déjouant les barrages de police. Klaus Reisinger, photographe autrichien, finit par convaincre trois pompiers et les accompagne, il se doit de témoigner au plus près du World Trade Center conscient du rôle qui lui incombe. Dans une ambiance de chaos et dans des conditions difficiles, il offre au monde le puissant témoignage d’un paysage apocalyptique où règne l’obscurité, la poussière et le néant.
Les rues désertes sont plongées dans une obscurité étrange, étouffées par la cendre, véritable mur opaque. Le World Trade Center n’est plus qu’un amas de cendre, de béton, d’acier et de verre. Les ruines des Tours se dressent telles des cathédrales. En fouillant les décombres, les pompiers appellent en vain à la recherche de survivants : » Hello, is anybody there ? Hello ? ». La profession gagne alors ses lettres de noblesse essuyant également des pertes : ils deviennent alors les nouveaux héros de toute une nation. Le World Trade Center devient Ground Zero.
Comme un réveil brutal, les Etats-Unis ont pris conscience de leur vulnérabilité. Le choc de l’attentat revendiqué par Al-Quaïda entraîna une énorme montée du patriotisme non seulement à New-York mais également dans toute l’Amérique, donnant naissance au Patriot Act aux conséquences parfois désastreuses. Les drapeaux pullulaient aux fenêtres des patriotes.
Dix années ont passé, New York a gardé ses stigmates mais se tourne vers l’avenir. Pendant ces dix années, le photographe français Jean-Michel Turpin a suivi la convalescence de la ville et de ses habitants et témoigne en images de leur quotidien. Après l’attaque, il restait une odeur bizarre dans l’air. Les personnes marchaient la tête baissée accablées de douleur, frappées dans leur for intérieur. Les hommages aux personnes disparues se multipliaient. Puis la vie a repris son cours, les New-Yorkais se sont relevés. Le rêve est revenu mais le patriotisme est resté. Les pompiers sont toujours des héros.
Ahmet Ertug, photographe turc, est également mis à l’honneur avec l’exposition Monumenta, clichés de monuments ayant une histoire, qu’on découvre en pénétrant dans la galerie. Sérénité et force sont les maîtres mots de son esthétique. PLa galerie Polka présente deux séries : Hagia Sophia, l’ancienne basilique Sainte Sophie d’Istanbul, et Palaces of Music, la dernière production du photographe sur les opéras du monde. Ces photos sont impressionnantes de beauté et de grandeur. Presque happée par chaque photo, on s’attarde devant elle pour en admirer les détails.
La Galerie Polka avec cette exposition In Memoriam New York – New York rend hommage à un événement terrible, véritable tournant dans l’Histoire : les attentats du 11 Septembre 2001. Son importance est double. Attentat le plus médiatique au monde, il fut le plus photographié et le plus filmé de l’Histoire permettant à un monde horrifié et choqué d’assister en direct à un événement sans précédent. Mais également le symbole d’un échec tant la douleur était forte et le désir de vengeance profond : celui d’un sursaut d’humanité suite aux attentats, d’une prise de conscience sur le déséquilibre du monde qui n’a pas eu lieu.
Crédit photo :
Image à la une : 11 septembre 2001, New York City Copyright : © Allan Tannenbaum. Courtesy Polka Galerie
Marie-Odile Radom
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